Julie, Guy et Zidina, parcours d’insertion chez CANCÉ

CANCÉ, les jeunes et l’insertion

Le BTP forme des jeunes depuis toujours grâce à l’apprentissage et plus récemment aux contrats en alternance. Cela fait partie de l’ADN du bâtiment comme de l’histoire de l’entreprise. Depuis 1961, les générations CANCÉ (grand-père, père et fils) ont embarqué dans le développement de leur activité de nombreux apprentis, peu importe leurs situations, pourvu qu’ils aient l’envie d’apprendre et de travailler. Des jeunes qui, les années passant, devenaient à leur tour tuteurs et transmettaient leur connaissance du métier.

Challenge Robert CANCÉ - Insertion jeunes CANCÉ

L’entreprise a relevé de nombreux défis grâce à cette dynamique. Elle portait, et porte toujours, dans la jeunesse une confiance pendant longtemps associée au sport, et particulièrement au rugby. Faut-il le rappeler, le challenge Robert CANCÉ (le grand-père) réunit tous les ans depuis 1980 de nombreuses équipes de cadets lors d’un tournoi international de rugby organisé à Nay (lire historique du tournoi), avec le siège social et l’atelier historique de l’entreprise en arrière-plan.

CANCÉ est devenue depuis 10 ans une entreprise nationale, tout en conservant ses valeurs familiales et celles du sport : solidarité et responsabilité. C’est dans cet esprit qu’elle permet aujourd’hui à des jeunes comme Julie, Guy ou Zidina de se retrouver réinsérés dans le monde du travail. Formés et embauchés, ils sont sortis de situations personnelles difficiles. Retour sur leurs parcours où le mot insertion prend tout son sens.

 

L’insertion se structure

En dehors des parcours classiques, l’insertion des publics les plus éloignés de l’emploi s’effectuent grâce au dispositif des clauses sociales d’insertion et de promotion de l’emploi. Ces clauses conditionnent depuis 2006 l’attribution de certains marchés publics (10,2% des marché publics en 2018*), et depuis peu les marchés mixtes et privés. Un dispositif dont Patrick Grand, le Directeur des ressources humaines, s’est emparé tout en l’adaptant.

En effet, les marchés « clausés » selon le lot et le montant, offrent un volume d’heures d’insertion variable. La mise en œuvre individuelle de ces différents volumes, 300 à 400 heures en moyenne, s’est avéré peu efficace. Il faut 910 heures pour un CAP, par exemple. Par ailleurs, le chantier selon Patrick Grand, ne confère pas l’environnement adéquat pour l’insertion : « la main d’œuvre doit être qualifiée et le rythme et les conditions de pose des structures métalliques ne permettent pas le tutorat que l’insertion requiert ». Le DRH de chez CANCÉ a résolu la situation en globalisant les heures des chantiers clausés, puis en assurant leur mise en œuvre dans une structure adaptée :  l’atelier de fabrication des menuiseries aluminium pour l’ensemble des chantiers de l’entreprise. Je préfère « des jeunes ou des parcours de vie à former plus qu’un nom dans une clause » souligne Patrick Grand.

 

Les partenaires

Directeur atelier alu - Insertion jeunes CANCÉ
Nicolas Loiseaux, jury correcteur au Lycée de Gelos en juin 2020 lors des Olympiades des métiers.

La vision « d’accompagner » des jeunes en difficultés sur un processus de formation et d’emploi est un engagement ambitieux qui nécessite les bons partenaires. CANCÉ s’est associé avec le GEIQ BTP 64, pour le volet portage et suivi des contrats, le Greta-Cfa Pau et le lycée des métiers de l’habitat et industrie de Pau-Gelos, pour le volet formation. A cela il faut ajouter comme partenaire interne le directeur de l’Atelier aluminium, Nicolas Loiseaux, dont le management d’intégration est fondamental. Ce n’est donc pas moins de trois tutorats, dont celui du GEIQ comme animateur principal, qui vont se mettre en place et se conjuguer pour amener des jeunes comme Julie, Guy et Zidina à sortir de leurs difficultés par la formation et l’emploi.

 

 

Le parcours de Zidina…

Zidina a quitté Mayotte pour tenter une évolution professionnelle en France.

Zidina - Insertion jeunes CANCÉSur l’île il s’initie à la mécanique des bateaux de pêche aux côtés de son père. Il poursuit des études dans ce sens et passe un Bac Pro en mécanique nautique. Zidina veut progresser mais son premier stage ne débouche sur aucun contrat. Déçu, il s’impatiente. En 2011 il décide de s’inscrire en BTS en métropole à Arras (62). Le changement est dur et les contenus sont difficiles. La première année ne donne rien. Il descend sur Bordeaux, même échec. En difficulté, il rejoint en 2013 son oncle installé à Pau avec l’espoir de meilleures opportunités. Il veut reprendre des études. Après 3 ans comme agent d’entretien à mi-temps au tennis club de Pau, son oncle, dans le bâtiment, lui suggère de contacter le GEIQ BTP. Karine Salaün, chargée du recrutement, le reçoit et lui présente les différents métiers. « Quand on rencontre un jeune, nous abordons l’ensemble de sa situation », explique Karine. « C’est nécessaire pour son orientation professionnelle, car il faut choisir avec lui une filière, et puis évaluer les enjeux personnels que nous prendrons en compte dans l’accompagnement ». Le choix se porte sur la menuiserie Aluminium, l’idée intéresse Zidina. En 2016 il est présenté par Karine à Patrick Grand et Nicolas Loiseaux le directeur de l’atelier Alu chez CANCÉ. Le contact est encourageant. Zidina est de nature réservée mais volontaire. La confiance s’établie avec les tuteurs. « Avec le recul je me félicite car je suis allé au bout, c’était pour moi le plus grand défi ». En effet le chemin s’est révélé aussi difficile que gratifiant. Le CDI est encore loin quand Zidina débute son CAP. Entre théorie et pratique, ce sont les maths qui lui coûtent le plus. Porté par le collectif de tuteurs, il fait preuve d’une volonté qui lui permet d’enchaîner CAP, BP et BAC Pro en 3 ans. L’alternance formation-entreprise lui plait car cela lui permet d’acquérir une bonne connaissance du métier. Côté pédagogique il fait preuve de sérieux et d’excellentes capacités manuelles. L’équipe du Greta au Lycée de Gelos l’implique en 2019 dans les concours départementaux et régionaux en miroiterie. Il obtiendra à chaque fois la médaille d’argent de meilleur apprenti. « Quand tu veux, tu peux », c’est sa devise. Toujours aimable et motivé, Zidina sort du dispositif d’insertion en 2019 au moment où il signe son CDI chez CANCÉ. « Pour moi je suis chez CANCÉ, j’y reste », dit-il avec évidence. « J’ai réussi car ils ont été très réactifs, toujours là pour apporter les bonnes réponses, au GEIQ, au lycée ou à l’atelier ». Entre temps Zidina s’est marié avec une béarnaise, il a eu 2 enfants et s’est installé à Louvie-Juzon au pied de la vallée d’Ossau. Une satisfaction qui se lit dans ses yeux et ravit ceux qui l’ont accompagné.

 

Le parcours de Guy…

Guy est camerounais et comme beaucoup il a choisi la route des migrants. Il a quitté ses rêves d’enfant pour tenter l’Europe, la France et la promesse d’une vie meilleure.

Guy - Insertion jeunes CANCÉOriginaire de l’ouest du Cameroun, il se réfugie dans la capitale Yaoundé à 14 ans pour s’éloigner des conflits en cours dans sa région. Pour survivre il vend du pain à la gare routière. Les voyageurs partis, il court vers le stade pour s’entrainer. Son rêve, joueur de foot. L’avenir reste incertain et la réalité précaire. Il décide de mettre ses économies dans la promesse d’une terre d’accueil. Nigeria, Niger, Algérie, Maroc, il prend la route du désert. Le passage à Tarifa en Espagne s’effectue à 8 sur un zodiac. Avec son extrait de naissance en poche il traverse l’Espagne et se retrouve à Pau sans papier et sans logement mais avec la ferme intention de trouver du travail pour régulariser sa situation. Cette détermination l’amène à frapper à toutes les portes des services sociaux et des entreprises dont à plusieurs reprises l’atelier aluminium de CANCÉ, ainsi que du GEIQ BTP. Par la force des choses le lien est fait, mais il ne s’en rendra compte que plus tard. « Dans GEIQ il y a le I de Insertion » aime à rappeler José Moreno, chargé de mission et tuteur de Guy au GEIQ BTP 64. « Cela signifie avoir un toit durable et une capacité de mobilité ». La motivation de Guy ne fait aucun doute. Cécile Collier la directrice et José décident d’orienter Guy dans tous les domaines. Une remise à niveau, un logement au foyer des jeunes travailleurs et le permis de conduire. La régularisation de Guy s’accélère. « Son énergie et sa gentillesse font l’unanimité » évoque Nicolas Loiseaux qui ne s’étonne pas de le revoir cette fois-ci dans le cadre d’un contrat GEIQ. « Guy fait plaisir à voir, il a eu une belle progression » rappelle le directeur de l’atelier Alu. Guy fait beaucoup d’efforts et commence en 2018 un titre professionnel sur une année et intègre l’atelier aluminium. « J’étais cariste avant d’avoir le permis de conduire » rappelle-t-il avec humour. « J’ai découvert l’assemblage, la pose, cela m’a plu ». Mais la partie théorique lui échappe pour une étourderie. Il n’obtient pas son titre professionnel. Il redouble avec pour seul objectif, repasser la matière qui lui fait défaut. En attendant, il accumule de l’expérience et l’affection de ses collègues. L’enjeu reste de taille, car sans titre professionnel, l’accès à un contrat dans l’entreprise est compromis. La fin de l’année scolaire 2020, perturbée par la crise sanitaire inquiète tous ses tuteurs. Mais Guy, son sourire et sa ténacité lui apporteront satisfaction. Il obtient son titre et dans la foulée un CDD de 6 mois. Seule déception pour Nicolas Loiseaux, l’impossibilité de fêter ce succès d’intégration. Guy revient de loin, « je me souviens l’avoir accueilli en migrant, et maintenant il est diplômé en CDD » évoque avec émotion Nicolas. Mais Guy voit déjà plus grand. « Mon rêve désormais est d’installer CANCÉ au Cameroun, dans mon pays, et de former les gens là-bas. Pour ce qui est du foot, je l’aurai toujours dans le cœur… »

 

Le parcours de Julie…

Julie cherche une filière qui la motive. La céramique, l’art ? ce sera finalement l’aluminium et l’enveloppe des bâtiments.

Julie - Insertion jeunes CANCÉArrivée de sa Touraine natale, Julie s’inscrit en Licence d’Arts à Tarbes après un Bac Pro Céramique. Elle n’accroche pas avec les contenus et quitte Tarbes pour s’installer à Pau. Cette expérience lui a permis de comprendre ce qu’elle ne voulait pas. Pour le reste c’est l’inconnu, et la vie seule dans la citée paloise ne lui apporte pas une réponse immédiate. Elle se rapproche de la mission locale qui lui propose un mini stage au Lycée de Gelos en Menuiserie Aluminium Verre. Le domaine lui parle mieux car plus technique et plus concret. Elle souhaite aller plus loin et intègre une formation en Menuiserie Alu par le Greta et retrouve le Lycée de Gelos ainsi que son futur collègue, un certain Zidina. Parmi ces stages, le dernier se déroule justement à l’atelier aluminium de CANCÉ. Au milieu d’un environnement principalement masculin « j’ai été très bien accueillie par Nicolas Loiseaux, et notamment par Myriam la seule femme monteuse de l’atelier », raconte Julie. « J’ai apprécié l’expérience et proposé au Directeur de me prendre dans le cadre d’un projet de Bac Pro en alternance, et Myriam a été super d’appuyer ma candidature ». Julie reçoit l’adhésion de Nicolas et passe par le GEIQ pour solliciter la mise en place de son projet. « L’insertion par la qualification c’est ce qui motivait Julie » évoque Karine Salaün du GEIQ. « Elle avait déjà un pied dans l’alternance, on a donc décidé de l’accompagner, en complétant des actions nécessaires sur le plan personnel ». Le contrat avec le GEIQ débute en 2017. En perspective un Bac Pro en Menuiserie Aluminium Verre au Lycée de Gelos, le seul à le proposer en Nouvelle Aquitaine. En complément Karine lui permet d’obtenir des aides financières pour le permis de conduire. « L’équipe du GEIQ est vraiment formidable, on n’a qu’une envie c’est de leur faire plaisir ». La motivation elle en a, et le cadre que lui procure le GEIQ lui donne confiance. Elle le prouve et leur fait plaisir en 2019 quand elle participe aux mêmes concours que Zidina. L’année se couronne par deux médailles d’or de meilleure apprentie au niveau départemental et régional et par le Bac Pro qu’elle obtient. Mais son parcours ne s’arrête pas là, elle décide de poursuivre vers un BTS. « Myriam n’est pas étrangère à cette décision, elle m’a appris beaucoup et j’ai envie de poursuivre ». Julie est motivée et le GEIQ toujours présent l’aide à trouver les financements pour lui permettre d’assumer l’internat et la cantine sur Bordeaux. CANCÉ continue de l’accueillir en alternance. L’exigence est supérieure dans tous les domaines. Les études et le travail, et le covid qui complique tout. Peu importe, l’objectif en vaut la peine. Son diplôme lui permettra de travailler dans la conception et la conduite de travaux. Son espoir, décrocher un CDI chez CANCÉ à l’issu de son BTS en 2021.

 

L’insertion, vers un développement durable

La globalisation des heures d’insertion a permis aux Établissements CANCÉ de passer de 2 à 7 jeunes en insertion par an. Tous ne connaissent pas la même issue, mais « l’expérience est positive car ils ont découvert qu’ils étaient capables de s’inscrire dans l’alternance formation-emploi », rappelle Cécile Collier la directrice du GEIQ BTP 64. Les parcours de Julie, Guy et Zidina démontrent que la voie d’une insertion réussie pour des publics en difficultés nécessite la prise en compte de multiples dimensions : sociales, économiques, pédagogiques. Elle est intimement liée à la compétence de l’équipe qui porte le projet et d’un suivi collectif de tous les instants. Julie, Guy et Zidina ont des profils et des parcours différents, mais rassemblent deux points communs : leur motivation d’un côté, de l’autre, la confiance de pouvoir progresser dans un environnement bienveillant. Pour CANCÉ les résultats positifs du système mis en place avec le GEIQ et le Lycée de Gelos motivent l’entreprise à maintenir voire développer cette dynamique d’accueil et d’accompagnement. Les compétences en interne et la confiance envers les partenaires sont encourageantes malgré la situation sanitaire et la crise économique qui affectent le pays depuis le printemps 2020.

collectif atelier alu - Insertion jeunes CANCÉ
De gauche à droite: Mohamed H. (Compagnon professionnel et Tuteur), Guy rostand K., Nicolas L. (Directeur Atelier Alu), Christophe B. (Technicien Bureau d’études et Tuteur de Julie), Julie L., Zidina M., Eric B.(Chef d’atelier et tuteur)
Les partenaires:

GEIQ BTP 64

Greta-Cfa Pau

Lycée des métiers de l’habitat et industrie de Pau-Gelos

(Contact : Eric Sartor, Directeur Délégué aux Formations Professionnelles et Technologiques)

La mission locale

Photo Lycée de Gelos©Luc Hautecoeur

Photos atelier et portraits©Laurent Pascal

* Chiffre juillet 2019 donné par l’Observatoire économique de la commande publique